Le travail de la directive SMA

Le mot travail, selon une étymologie parfois contestée, viendrait du latin tripalium qui désignait un ingénieux instrument de torture consistant à ne pas empaler un condamné avec un seul pal mais avec trois, disposés en faisceau. La directive Services Médias Audiovisuels adoptée en 2018 dont la transposition est actuellement et douloureusement en cours en Europe et notamment en France entend aussi contraindre les services de svod américains selon trois axes : les obliger à investir une partie de leur chiffre d’affaires dans la production locale, les obliger à offrir au moins 30% de programmes européens et enfin les soumettre aux règles fiscales et réglementaires non plus du seul pays où elles s’installent mais aussi de ceux qu’elles visent. Un article récent de Variety expose cette torture à laquelle sont promises les plateformes américaines. Mais ne peut-on pas aussi renverser la perspective en remarquant que Netflix, Amazon et Disney, les trois services qui mènent une vraie offensive européenne présentent trois modèles tellement différents qu’il sera bien difficile de les faire entrer dans un seul texte ? Jusqu’à le faire éclater ?

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Requiem pour l’appareil photo numérique, et retour aux sources de la photographie

Aussi vite qu’il était apparu (voir sur ce site notre article un rare cas de vraie révolution) le marché de l’appareil photo numérique semble à présent condamné à disparaître. Après un sommet en 2010 avec environ 120 millions d’appareils vendus dans le monde, le marché a été très rapidement divisé par deux, en à peine trois ans, puis à nouveau par trois pour se contenter de 20 millions d‘exemplaires en 2019. Il est extrêmement rare qu’un objet aussi répandu voie son marché divisé par six en moins de dix ans.

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Netflix à la manoeuvre: à propos de l’étude Analysis Group sur les conséquences du projet de transposition de la directive SMA

Le cabinet d’études Analysis Group a publié le 10 septembre 2020 un rapport « réalisé avec le soutien de Netflix » alertant sur les conséquences potentiellement négatives de l’obligation qui serait faite aux plateformes de svod de contribuer trop fortement à la production audiovisuelle et cinématographique française. Cette étude propose une solution alternative à l’idée d’imposer une obligation de production proportionnelle au chiffre d’affaires. Le but est de susciter un front uni des diffuseurs historiques (français) et nouveaux (américains) face aux producteurs français de cinéma et d’audiovisuel,.

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Le destin des robots: punir, séduire, distraire, travailler. Mais jusqu’à quand?

Le robot est une très vieille idée qui a mis plusieurs millénaires à se réaliser. Car pour qu’une machine fasse mieux que faire toujours la même chose, toujours de la même façon, donc fasse preuve d’un minimum d’autonomie il a fallu qu’elle comporte au moins un microprocesseur. Ainsi les robots, les vrais, sont bien les enfants de la révolution numérique. Mais leur cahier des charges avait été largement anticipé par la fiction, quoique pas par la science-fiction (voir plus bas). Les robots ont envahi depuis longtemps les écrans de cinéma. La liste de films de robots est devenu elle-même presque un genre et on en trouve facilement sur Internet certaines qui en proposent plus de cent (par exemple sur Senscritique, une liste de 189 films). Cependant à présent la réalité court vite derrière et parfois devant la fiction: les robots de Boston Dynamics, ex-filiale de Google, les robots tueurs de l’armée américaine, les prodiges de l’intelligence artificielle d’AlphaGo (Google là aussi) ou le système chinois de crédit social ne rougissent pas devant le cinéma. Un futur inquiétant? Sans doute mais également un riche passé.

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Cinéma : Aubenas d’abord, Los Gatos plus tard

La crise mondiale du printemps 2020 fait craindre ou parfois espérer qu’il y ait un avant et un après, où beaucoup, sinon tout, serait changé. La table rase est toujours plus excitante que le prolongement des courbes. Mais pour l’audiovisuel cela n’en prend pas le chemin. Au contraire la crise accentue jusqu’à la caricature des tendances déjà à l’œuvre et plusieurs fois décrites sur ce site. Elle accable les maillons affaiblis du système, elle renforce encore ses composantes dynamiques. Elle rend encore plus urgentes des adaptations, pas seulement réglementaires, qui étaient déjà nécessaires depuis plusieurs années.

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Le risque absent des films-catastrophe

Le cinéma, c’est comme l’astronomie. Avec une bonne vue, une nuit claire, dans un endroit désert, on peut voir un bon millier d’étoiles. Comme le nombre de films qu’un bon amateur de cinéma pourrait citer si vous l’enfermiez quelque temps dans une cave. Mais les astronomes disposent d’instruments qui, braqués sur une partie du ciel, vont révéler un fourmillement d’étoiles dans un coin de ciel où, à l’œil nu, il ne semblait n’y en avoir aucune. C’est pareil pour le cinéma : si vous prenez un coin du « ciel », par exemple le western, là où un amateur ne verra que trois dizaines de films, un spécialiste en citera plusieurs centaines. Le zoom peut ainsi être approfondi non pas vers l’infini, contrairement aux étoiles, mais en pratique au-delà de l’entendement humain. Que le télescope s’appelle Patrick Brion, Jean Ollé-Laprune ou IMDB il n’y a pas de domaine qui ne puisse décourager la recension. Ainsi, s’agissant de la catastrophe au cinéma, il faut prévenir d’emblée le lecteur qu’il ne bénéficiera ici que d’une modeste lunette à faible grossissement. Il est bien possible que l’heureux possesseur d’un instrument plus puissant s’insurge contre l’absence ici de tel astre oublié, ou conteste le fait que telle ou telle partie de la voute étoilée paraisse vide alors que pour lui elle est peuplée. Mais de même que l’on a coutume de résumer le ciel par 88 constellations qui en permettent une description sommaire mais pratique, il ne s’agit ici que de parcourir à grandes enjambées une foisonnante filmographie pour en dégager les grandes lignes.

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